lundi 24 septembre 2007

Etre né quelque part...

La ballade des gens qui sont nés quelque part - Georges Brassens

C'est vrai qu'ils sont plaisants, tous ces petits villages,
Tous ces bourgs, ces hameaux, ces lieux-dits, ces cités
Avec leurs châteaux-forts, leurs églises, leurs plages,
Ils n'ont qu'un seul point faible, et c'est d'être habités,
Et c'est d'être habités par des gens qui regardent
Le reste avec mépris du haut de leurs remparts,
La race des chauvins des porteurs de cocardes,
Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part,
Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part.

Maudits soient ces enfants de leur mère patrie
Empalés une fois pour tout's sur leur clocher,
Qui vous montrent leurs tours, leurs musées, leur mairie,
Vous font voir du pays natal jusqu'à loucher.
Qu'ils sortent de Paris ou de Rome ou de Sète
Ou du Diable Vauvert ou bien de Zanzibar,
Ou même de Montcuq, il s'en flattent, mazette,
Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part,
Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part.

Le sable dans lequel, douillettes, leurs autruches
Enfouissent la tête, on trouve pas plus fin ;
Quant à l'air qu'ils emploient pour gonfler leurs baudruches,
Leurs bulles de savon, c'est du souffle divin.
Et petit à petit, les voilà qui se montent
Le cou jusqu'à penser que le crottin fait par
Leurs chevaux, même en bois, rend jaloux tout le monde,
Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part,
Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part.

C'est pas un lieu commun celui de leur naissance,
Ils plaignent de tout coeur les pauvres malchanceux,
Les petits maladroits qui n'eur'nt pas la présence,
La présence d'esprit de voir le jour chez eux.
Quand sonne le tocsin sur leur bonheur précaire,
Contre les étrangers tous plus ou moins barbares,
Ils sortent de leur trou pour mourir à la guerre,
Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part,
Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part.

Mon Dieu, qu'il ferait bon sur la terre des hommes
Si l'on n'y rencontrait cette race incongrue,
Cette race importune et qui partout foisonne :
La race des gens du terroir, des gens du cru.
Que la vie serait belle en toutes circonstances
Si vous n'aviez tiré du néant ces jobards,
Preuve peut-être bien de votre inexistence :
Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part,
Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part.

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